LES CÉLÉBRATIONS DE BOURGOGNE

1865 ● Statue de Vercingétorix

La statue colossale de Vercingétorix fut érigée le 27 août 1865 à la pointe Ouest du Mont-Auxois, dominant le champ de la dernière bataille, à l’issue de quatre années de fouilles archéologiques, mettant fin provisoirement à la polémique sur la localisation. Elle marque un jalon dans l’évolution des thèmes gaulois et l’accession de Vercingétorix au rang de héros officiel. Elle apparaît aussi dans un contexte de rivalité avec le monument d’Arminius, libérateur des peuples germaniques, érigé à partir de 1841, terminé en 1875. Pourtant qualifiée par une critique dubitative de « dinanderie », elle a été conçue en fonction du paysage. Sa monumentalité illustre l’alliance entre l’architecture et la sculpture, grâce à une technique innovante, qui sera imitée pour la statue de la Liberté. Pourtant, interrogé à plusieurs reprises, Napoléon III répondit qu’il n’avait pas l’intention de l’inaugurer, laissant ainsi « un sentiment d’inachevé ». Des deux versions qui lui sont soumises par le sculpteur Aimé Millet (Paris, 1819-1891), auteur, entre autres, de la statue d’Apollon qui surmonte l’opéra de Paris, l’Empereur retient celle qui incarne le dernier épisode important de la Guerre des Gaules et occupe une place prépondérante dans son Histoire de Jules César : un Vercingétorix défaitiste et non la figure plus vindicative du résistant, comme l’aurait souhaité une grande partie de l’opinion. Viollet-le-Duc, inspecteur général des monuments historiques, est chargé non seulement du dessin du piédestal, mais aussi de surveiller l’exécution de la statue. Elle ne fut pas payée par Napoléon III sur sa cassette personnelle, mais sur le crédit des ouvrages d’art et décoration d’édifices publics (arrêté du 2 juillet 1862). Avant son départ de l’atelier parisien, elle sera exposée au Palais de l’industrie, puis transportée debout, en raison de sa fragilité, non par chemin de fer, les tunnels et les ponts constituant un obstacle, mais sur un fardier attelé de six chevaux. D’une hauteur de 6,60 m, elle est en tôle de cuivre battue et repoussée, rivée sur une charpente métallique, imaginée par Viollet-le-Duc. Vercingétorix serait représenté sous les traits de Napoléon III jeune, ce qui est démenti par certains historiens. Il est vêtu selon les descriptions littéraires de Jules César et des auteurs anciens, mais avec quelques anachronismes : la cuirasse et l’épée sont inspirées d’exemplaires de l’Âge du bronze, bien antérieurs au siège d’Alésia et les bandelettes qui enserrent les braies, appartiennent au début du Moyen-Âge. Elle est posée sur un piédestal de 7m de haut en granit de Saulieu et pierre de Pouillenay, portant en partie supérieure, une inscription sur cuivre : « La Gaule unie, formant une seule nation, animée d’un même esprit, peut défier l’univers », traduction erronée de la phrase latine tirée du De Bello gallico, VII, 29 (atque unum consilium totius Galliae effecturum, cuius consensui ne orbis quidem terrarum possit obsitere). Bien que le maréchal Pétain, en août 1942, ait rappelé le « sacrifice salvateur de Vercingétorix », la statue est sauvée de justesse de la fonte décidée par Abel Bonnard, ministre de l’Éducation nationale, en avril 1944. En 1978, le métal ayant rouillé, elle fut déposée, à la demande de Jean-Bernard Devauges, alors directeur des antiquités historiques de Bourgogne, et restaurée dans les ateliers Moutard aux Riceys (Aube). Le monument de Vercingétorix a été classé parmi les monuments historiques le 19 mars 2014.- BS

Pierre Quarré, « Les monuments de bronze à Dijon et en Côte-d’Or pendant l’occupation allemande », Annales de Bourgogne, t. 17, 1945, p. 48-54 ; - Anne Pingeot, « Les Gaulois sculptés (1850-1914) », Nos ancêtres les Gaulois, actes du colloque international de Clermont-Ferrand, 23-25 juin 1980, éd. Paul Viallaneix et Jean Ehrard, 1982, p. 225-282 ; Hélène Jagot, « Le Vercingétorix d’Aimé Millet (1865), image équivoque du premier héros national français », Histoire de l’art, no 57, 2005, p. 79-91, ill. ; - Notes fournies par Claude Grapin, conservateur départemental du patrimoine, chargé du MuséoParc et du musée Alésia et dossier de Bernard Sonnet pour la protection au titre des monuments historiques, DRAC Bourgogne, 2011.