LES CÉLÉBRATIONS DE BOURGOGNE

0 ● Naissance du poète Roger de Collerye

Roger de Collerye est un contemporain de Clément Marot avec lequel il eut des relations épistolaires. Il a longtemps été ignoré et on pense qu’il est né à Paris car l’éditeur de ses poésies imprimées en 1536 l’indique expressément mais sa date de naissance est incertaine entre 1468 et 1470. On ignore tout de sa famille. Il était prêtre et peu avantagé des biens de la fortune : « Infortuné, je suis, et povre prestre / Privé des biens de ce monde terrestre ». Il fait ses études de droit et reçoit la prêtrise à Paris avant d’occuper en Bourgogne le poste de secrétaire de l’évêque d’Auxerre Jean Baillet, place qu’il conserve avec François de Dinteville, son successeur, jusqu’à la mort de ce dernier en 1530.

Entre 1502 et 1530, Collerye publie quelques poésies et soigne ses relations littéraires aussi bien que mondaines. Nobles et bourgeois lui commandent des épitaphes. Lors du passage possible de la reine à Auxerre on lui confie une Satyre pour l’entrée de la Royne à Auxerre, mais la reine ne passa pas et la pièce changea de nom pour devenir : Satyre pour les habitants d’Auxerre. Cette réputation littéraire ne lui permet pourtant pas d’obtenir les charges ecclésiastiques (cure et prieuré) qu’il sollicite à plusieurs reprises et qui lui auraient permis d’augmenter ses revenus. Il ne conserve pas le poste de secrétaire à l’évêché en 1530. C’est ce qui détermine Collerye, malgré son âge, à tenter sa chance à Paris où il séjourne entre 1530 et 1533. Visiblement déçu, il ne trouve pas dans la capitale les appuis qu’il escomptait et grâce auxquels il aurait pu faire son chemin à la cour de François 1er comme Marot. Il connaît la misère, l’humiliation, les dettes, les procès, le froid, la maladie, la faim. Les épîtres qu’il écrit à ses protecteurs éventuels  sont nombreuses mais le ton reste léger pour en faire un amusement.

Ainsi son Epistre d’un povre escollier : « Si vous supply, mon trescher enseigneur,/Qui me povez commander en seigneur/ Vos bons plaisirs, avoir sur moy esgard/ Priant à Dieu qu’il vous preserve et gard/ De par celluy qui est prest de partir,/ S’on ne luy veult quelque bien departir. »

Si cette notice avait été rédigée du temps de l’abbé Lebeuf, on aurait fait de Collerye un « Roger Bon temps », un homme toujours de bonne humeur car ce nom est assez fréquemment utilisé dans ses poésies. On aurait pu en faire un « abbé des fous » puisque chaque année, devant la cathédrale d’Auxerre, une assemblée élisait un « abbé des fous » et Collerye écrivit une ballade Cry pour l’Abbé de l’église d’Ausserre et ses suppostz. Si cette notice avait été rédigée après les travaux de Charles d’Héricault dans son édition de ses œuvres en 1855, on aurait eu une figure romantique de bohême littéraire. Mais en 1997, Sylvie Lécuyer a fait paraître Roger de Collerye, un héritier de Villon à partir de sa thèse de doctorat et elle revient aux sources en abandonnant « la rêverie autour notamment de la dramaturgie et des rites de carnaval » introduite par Lebeuf et l’image d’un poète, génie méconnu et marginal de la biographie romancée d’Héricault. Collerye serait mort à Laduz en 1540.

Les Œuvres de maistre Roger de Collerye, Pierre Roffet, Paris, 1536 ; - Œuvres de Roger de Collerye, éd. Ch. d’Héricault, Jannet, 1855 (« Bibl. elzévirienne », 17) ; - Frédéric Lachèvre, Roger de Colllerye et ses poésies dolentes, grivoises et satiriques, Clavreuil, 1942, 112 p. ; - Roger de Collerye, Complainctes, ballades et rondeaux, éd. J.R. Gosselin, Stanford University, 1969.