LES CÉLÉBRATIONS DE BOURGOGNE

-1862 ● Naissance de Maurice Deslandres, professeur de droit

Rien ne prédestinait ce jeune juriste issu de la bonne bourgeoisie parisienne, né le 24 décembre 1862 à Paris, à un destin bourguignon : pourtant, agrégé en 1889 et nommé à Dijon, il y fit toute sa carrière et y enracina sa famille. Il enseigna notamment le droit constitutionnel et écrivit à la fin de sa vie une remarquable Histoire constitutionnelle de la France (3 vol. Sirey, 1932-1937) qui émerveille aujourd’hui par la finesse de ses analyses ; il s’y montrait très critique de la République parlementaire qu’il voyait fonctionner sous ses yeux. Il fut un doyen apprécié des étudiants et même de ses collègues, ce qui est plus rare. Acquis dès sa jeunesse aux idées du catholicisme social, il devint l’un des principaux animateurs des Semaines sociales, où il intervenait régulièrement, ce qui lui valut des critiques du Recteur. Il s’engagea très tôt dans la mise en place du Crédit immobilier populaire de la Côte-d’Or, qui veut aider les ouvriers à devenir propriétaires : c’est le sujet qu’il choisit de traiter devant ses confrères lorsqu’il fut reçu par l’Académie des sciences, arts et belles-lettres en 1922. On le sollicitait pour faire partie des diverses sociétés ou offices qui voulaient construire des HBM (Habitation Bon Marché). Mais il a aussi compris très tôt l’intérêt de défendre les consommateurs et devint président de la première ligue d’acheteurs, créée sur le modèle américain (L’acheteur : son rôle économique et social ; les ligues sociales d’acheteurs, Alcan, 1911, 510 p.). Le professeur Deslandres voyageait et s’intéressait aux institutions d’autres pays comme la Grande-Bretagne, la Suisse et les États-Unis. Après quelques hésitations, il défendit aussi la cause des femmes, pensant que leur participation aux élections aiderait le développement des lois sociales. Décédé le 14 avril 1941 à Annemasse, il laisse une œuvre scientifique importante en même temps que le souvenir d’une figure respectée de l’action sociale concrète, celle qui ne se limite pas aux discours.

Pierre Bodineau, "Un académicien en lutte pour le progrès social : Maurice Deslandres", Le progrès social : actes de la Conférence nationale des académies des sciences, lettres et arts, Paris, Institut de France, 2009, dir. Michel Woronoff, Paris, 2009, p. 79-87 ("Akadémos", 29).