La lutte entre les parlements et le pouvoir royal sous le règne de Louis XV est connue pour son intensité et le choc des conceptions du pouvoir. Sans entrer dans cette discussion, rappelons simplement que les parlements ont développé, à partir de 1754, la théorie de « l’union des classes » selon laquelle ils seraient les parties d’une même cour et se devraient assistance.
Dans l’affaire qui oppose le parlement de Rennes au roi entre 1760 et 1770, les magistrats du parlement de Paris appliquent cette doctrine et soutiennent les magistrats rennais. Aussi le garde des sceaux Maupeou, au nom du roi, fait arrêter et exiler 130 d’entre eux le 20 janvier 1771 alors qu’il prépare une réforme de la justice dont les points forts sont la fin des charges vénales, la réorganisation des ressorts et la gratuité de la justice. L’édit de réorganisation est daté du 23 février 1771. Les parlementaires bourguignons ont soutenu leurs confrères parisiens par une lettre au roi puis par des remontrances (16 avril 1771). La réaction royale eut lieu les 5 et 6 novembre 1771 : les décisions et remontrances sont cassées, les offices sont supprimés et 14 parlementaires très actifs sont exilés dans leurs terres (Charles de Brosses a parlé d’une « Sibérie »). Il y a désormais, à Dijon, une scission entre les exilés et les « rémanents » dont certains acceptent les 47 nouveaux offices, et surtout beaucoup d’indécision. Au cours des quatre années qui suivent, les rémanents tentèrent d’intervenir pour adoucir le sort des exilés, admis à rentrer à Dijon en janvier 1772. Les nouveaux tribunaux ne purent guère donner leur mesure car une des premières décisions de Louis XVI, le 27 octobre 1774, fut l’abolition de la réforme Maupeou et la reconstitution des anciennes cours. Le parlement de Dijon fut rétabli le 24 mars 1775, décision enregistrée à Dijon le 3 avril suivant. Ajoutons que le 31 octobre 1771 la cour souveraine de la principauté des Dombes disparaissait au profit du parlement de Bourgogne. – CL
Jean Sigmann, La révolution de Maupeou en Bourgogne (1771-1775) : la caste parlementaire à la fin du XVIIIe siècle, Besançon, l’auteur, 1981, 147-XII p. (Mémoire DES, Dijon, 1935) ; – Nicolas Laurent, « Le Parlement de Dijon et le gouvernement royal à la fin de l’ancien régime », Yves Sassier et Olivier Chaline, dir., Les parlements et la vie de la cité (XVIe-XVIIIe siècle), Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2004, p. 143-171 (consultable en ligne).